association internationale pour une politique industrielle des technologies de l'esprit
Récemment, je m'étais ouvert à Monsieur Battesti de mon manque de vision claire pour le fait de l'identité nationale. Je ne comprenais pas très bien de quoi il retournait. En effet, étant profondément, viscéralement français donc tellement pénétré du sujet, il m'était impossible de l'embrasser dans sa globalité.
Au jourd'hui, je remercie le gouvernement de la République de me permettre d'y voir un peu plus clair en me montrant ce que n'est pas l'identité nationale...
Il y a peu, Monsieur le Ministre de l'Education Nationale décidait qu'il
fallait dorénavant étudier, de manière optionnelle, l'Histoire et la
Géographie en classe de Terminale Scientifique. L'argument avancé était le suivant : la filière scientifique étant la voie royale pour les études
supérieures, un grand nombre de candidats aux dites études s'y engouffrent frénétiquement délaissant au passage les études littéraires.
Conséquence, la suppression, car en fait il s'agit bien de cela, en
Terminale S de matières aussi importantes pour la mémoire que sont
l'Histoire et la Géographie devrait permettre de revitaminer la filière
littéraire et de voir se concentrer davantage les élèves de TS sur leurs
études de prédilection.
Cependant, il semblerait malgré tout que les matières scientifiques
connaissent une importante désaffection de la part du public. J'avoue que cette réflexion et la solution proposée me laissent perplexe. A qui va profiter le crime ?
Là, j'ouvre une paranthèse : je n'ai pas de solution à ces problèmes, je
ne m'y étendrai donc pas. Mais je pense avoir une idée de leur origine.
Depuis des années, une opposition artificielle et malsaine entre le
littéraire et le scientifique, érigée en dogme, a la volonté de nous faire
croire qu'un matheux aura plus de facilité à répondre aux problèmes qui lui seront soumis. Les mathématiques que j'admire en tant qu'édifice spirituel d'une absolue beauté, sont aussi un langage. Elles possèdent, au même titre que la langue française une symbolique et une articulation. Elles rendent compte de la nature et de ses phénomènes ainsi que la philosophie. Je ne vois donc pas le pourquoi de cette fracture. Je referme la paranthèse.
A l'heure du débat sur l'identité nationale, il est proprement intolérable
de « placardiser » ces matières tellement liées à l'Humain. La
construction de l'Europe et de la France s'est faite depuis plus de deux
mille années à coups de guerres, d'invasions, d'occupations et de famines. Bref, de hold-up avec prises d'otages. Depuis maintenant un peu plus de soixante années nous connaissons une ère de Paix et de prospérité jamais atteinte au cours des millénaires précédents.
Chaque jour qui se lève devrait nous voir, au moins par des prières
muettes, remercier les dirigeants visionnaires qui ont eu l'audace de
rêver la Paix et la Sécurité pour tous les habitants de ce vieux
continent. Nous devrions être conscients de l'extraordinaire situation
dans laquelle nous nous trouvons. L'Histoire et la Géographie sont
indispensables à ce devoir de mémoire et de reconnaissance du chemin parcouru. Au moins pour ne pas avoir à le refaire.
Tout au contraire, cette incurie d'Etat envers l'Histoire et la
Géographie, et d'autres disciplines, vont nous faire consommer de la Paix avec l'illusion qu'elle est une denrée inépuisable alors qu'elle
mériterait de croître sous la bannière du développement durable.
La culture en général, au sein de laquelle l'Histoire et la Géographie ont
toute leur place, est un système dynamique. En tant que tel, elle a
tendance à tomber vers son état d'énergie le plus bas. Si on ne lui
insuffle pas l'information nécéssaire à son développement, elle ne peut
survivre. Nos décideurs ont bien compris ce phénomène et en crétinisant au possible les masses, ils étouffent la culture et de fait, offrent au consumérisme les immenses plages de cerveau disponibles dont il a désormais besoin.
Il est certain que dans une société où il est obligatoire de consommer
aveuglément, où la seule valeur reconnue est le cumul de richesses
matérielles et l'affichage ostentatoire de la possession d'une Porshe
Cayenne et d'une Rollex avant l'âge de cinquante ans, les études, la
culture et la mémoire, sont au mieux considérés comme parasitaires et
pouvant freiner l'appétit consumériste. Au pire elles sont totalement
subversives et dangereuses.
L'identité nationale n'est définitivement pas la consommation effrénée
réalisée par la destruction de notre socle commun au profit des marchands du temple. Ca, je le savais mais c'est dorénavant irrémédiablement ancré en moi. Merci encore au gouvernement de m'avoir éclairé sur ce sujet et permis de me révolter encore un peu plus.