Économie (politique)
Originellement et étymologiquement, l’oikonomia est le gouvernement (nomos) de la maison familiale (oikos) pour son bien commun – un mode de production et d’administration domestique qu’Aristote oppose à l’acquisition du gain, celle-ci étant devenue par un renversement de l’histoire ce qu’aujourd’hui on appelle l’économie.
Le divorce de l’homo oeconomicus et de l’homo sociologicus a conduit à la destruction de ce dernier, c’est à dire à la destruction des sociétés et des individus psychiques qui les composent. L’idée que l’économie est une sphère autonome et l’idée corrélative que le social est hétéronome (soumis à l’économie) sont historiquement récentes et doivent être surmontées. The Great Transformation (1944) annoncée par Polanyi n’a pas eu lieu. Nous vivons toujours dans une économie de marché, gouvernée par les prix et par eux seuls, où tout se mesure, a un prix, non seulement les biens, ce qu’on appelle communément les marchandises, mais aussi le travail, la terre, la monnaie.
La faiblesse congénitale de la société du XIXe siècle ne vient pas de ce qu’elle était industrielle, mais de ce qu’elle était une société de marché.
Les crises récentes, dont nous ne parvenons plus à sortir, nous ont confirmé que le marché est de part en part politique : ce n’est pas une seconde nature, une loi, sans alternative, de la nature. Nous savons désormais que le marché a des mains, qu’elles sont visibles, et qu’elles sont rarement propres.
Il n’y a pas d’économie qui tienne autrement que comme économie politique.
L’économie politique se concentre aujourd’hui autour de trois questions :
1) celle du travail, en tant que le gouvernement par l’emploi est voué à disparaître ;
2) celle de la propriété, en tant que le gouvernement des industries culturelles est voué à disparaître ;
3) celle de la valeur, en tant que la mesure de la valeur par la richesse purement monétaire est vouée à disparaître.