Vers un art de l’hypercontrôle #2 Bifurcations, événement, inventions, néguentropie

Rencontres thématiques du 12 au 14 novembre à Aix-en-Provence.
Conférences, tables rondes, présentations de projets et d’œuvres artistiques, projections. Une coproduction Alphabetville / Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence s’inscrivant dans e-topie 2015, en collaboration avec l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou

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  Consulter les vidéos sur Vimeo (réalisation Willy Legaud)

Présentation

Il y a quelques mois, nous invitions Bernard Stiegler à venir nous parler de « l’art de l’hypercontrôle ».
Aujourd’hui, une réflexion croisée s’est ébauchée, qui mobilise divers partenaires dont l’association Alphabetville, l’école supérieure d’art d’Aix-en-Provence, l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou et l’équipe de l’antiAtlas des Frontières.
Nous proposons de partager une nouvelle étape ensemble, avec des invités, acteurs et observateurs, artistes et scientifiques. Au coeur de nos discussions se trouve toujours cette proposition, dont la formulation est d’abord une matière à travailler et un point de départ, d’un "art de l’hypercontrôle". Il s’agit pour chacun de nous, à partir de ses recherches, de sa pratique, de son expérience, d’en questionner le sens et d’en explorer les potentialités. L’expression d’un "art de l’hypercontrôle" trouve sa source dans certains aspects du travail de Bernard Stiegler.
Celui-ci définit nos sociétés comme des sociétés hyperindustrielles, dont l’une des caractéristiques majeures consiste dans le développement de processus d’automatisation non seulement des machines, mais aussi des comportements, des savoirs, des désirs, des façons de vivre. Au coeur de ce mouvement qui conduit vers des « sociétés automatiques », il y a des technologies et des logiques de contrôle. Ces processus engagent des dispositifs machiniques fondés sur la collecte et le traitement de masses gigantesques d’informations, des processus d’homogénéisation des pratiques et de quantification des normes, une typologie des usages et des "profils" qui portent en eux la menace de ce que Stiegler appelle une prolétarisation totale, une prolétarisation qui touche non seulement le champ du travail productif, mais aussi celui des loisirs, de la culture et du savoir.
Ce sont bien les façons de percevoir, de se projeter et de se constituer comme des sujets qui se trouvent en jeu. Il ne s’agit pas ici de condamner la technique considérée comme une mystérieuse puissance indépendante, mais d’interroger le champ des potentialités opposées qu’elle porte quand elle est associée à des stratégies à la fois politiques, économiques, et culturelles. Il s’agit de mieux comprendre ces processus, et ce qui vient y répondre non seulement par des actes de résistance, mais par des actes d’invention, de création, d’innovation et de réappropriation démocratique.
Si l’on conçoit l’automatisation sociale comme un processus d’entropie, ces constructions singulières, complexes et vivantes, apparaissent comme des bifurcations néguentropiques. De ce point de vue, la question se pose d’un art de l’hypercontrôle.

« Un « art du contrôle » tel que Deleuze l’envisage, et de « l’hypercontrôle » tel que je tente de le décrire, cela n’est pas autosuffisant - sauf à entendre et à faire entendre ou réentendre ars dans art : comme dans les grandes époques de l’inventivité artistique et spirituelle, un « art de l’hypercontrôle » est indissociable d’une inventivité juridique, philosophique, scientifique, politique et économique. »
Bernard Stiegler, extrait de « Ars et inventions organologiques dans les sociétés de l’hypercontrôle ».

Bernard Stiegler, philosophe, docteur de l’École des hautes Études en Sciences Sociales, est président de l’association Ars industrialis, directeur de l’Institut de Recherche et d’Innovation. Il est visiting professor à la Humboldt Universität de Berlin, distinguished professor à l’Université de Nanjing et professeur associé à l’Université de technologie de Compiègne. Il est l’auteur de trente ouvrages, dont les trois volumes de La technique et le temps font référence dans sa philosophie ; et récemment paru La société automatique 1. L’avenir du travail, Fayard, 2015.
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